Afin de pouvoir se réfugier dans un endroit sûr en cas de conflit armé ou de catastrophe naturelle, certains investissent dans la construction de bunkers privés sur leur terrain. Quelle réglementation respecter ? Quels matériaux utiliser ? On fait le point.
Si les Français ne sont pas du genre catastrophistes, la guerre en Ukraine et les velléités du Kremlin ont réveillé nos pires craintes… Entre le réarmement des États, le gouvernement invitant chaque ménage à se constituer un kit d'urgence pour tenir 72 heures mais aussi l'essor d'annonces en ligne pour des kits de survie ou des bunkers, l'heure est aux mesures de protection. Vous envisagez de créer un abri sur votre propriété ? Voici quelques éléments clés à considérer.
La réglementation habituelle
Aucune législation spécifique n'encadre ce type de bâtiment à l'échelle nationale. Dès lors, c'est la réglementation habituelle en matière d'urbanisme qui s'applique. Comme pour toute construction, vous serez ainsi dispensé de formalités administratives si votre abri fait moins de 5 m2. En revanche, si sa surface de plancher ou son emprise au sol est comprise entre 5 et 20 m2, il faudra en passer par une déclaration préalable de travaux. Et au-delà de ce seuil, le permis de construire sera de rigueur.
Attention toutefois à vérifier les contraintes locales ! Si votre propriété est située dans un secteur protégé, la déclaration préalable sera obligatoire même en deçà de 5 m2. En outre, le plan local d'urbanisme peut imposer des restrictions supplémentaires.
D'autre part, cette annexe à votre propriété doit être déclarée aux impôts puisqu'elle aura une incidence sur votre taxe foncière.
Un emplacement délicat
La première chose à déterminer concerne le type d'implantation : au-dessus du niveau du sol, complètement sous-terrain ou semi-enterré.
En effet, dès lors qu'il s'agit de creuser votre sous-sol, le choix de l'emplacement est particulièrement sensible, a fortiori lorsqu'on sait que les bunkers sous-terrains sont en général bâtis 5 m en dessous de la surface et parfois jusqu'à 10 m. Pour assurer la pérennité de l'ouvrage, il faut donc sélectionner un lieu éloigné à la fois des arbres, pour éviter que les racines n'endommagent la construction à long terme, des bâtiments existants pour ne pas fragiliser leurs fondations, mais aussi des sources d'eau pour limiter le risque d'infiltrations et d'inondation. Il convient également de faire une étude de la nature et de la composition du sol pour adapter au mieux les caractéristiques techniques.
À chacun son bunker
Du simple abri temporaire au véritable loft aménagé tout confort pour y vivre plusieurs mois, tout est possible en matière d'abri de protection mais sera plus ou moins complexe et onéreux.
A minima, l'abri anti-tornade permet de se mettre en sécurité pendant plusieurs heures durant une tempête. On le construit en béton avec un escalier en sous-sol, une porte en acier et un tuyau d'aération. À l'inverse, le bunker antiatomique est bâti avec une épaisse couche de béton armé et des armatures métalliques afin de protéger les occupants contre les armes de guerre, les explosions d'armes conventionnelles et nucléaires, ainsi que les retombées radioactives. Le système de ventilation doté de plusieurs filtres doit ici permettre d'empêcher tout gaz ou poussière nocif de pénétrer. Il faudra également installer un dispositif sanitaire et de gestion des déchets dès lors que le séjour est amené à durer plusieurs jours, voire semaines… Dans tous les cas, le respect des normes antisismiques de construction est impératif.
Vers qui se tourner ?
On l'aura compris, construire un bunker réellement sécurisé ne s'improvise pas et peut coûter très cher (plusieurs dizaines de milliers d'euros) ! Pour réduire la facture, il peut alors être tentant de suivre des blogs et tutos qui se proposent de vous indiquer comment construire votre propre abri ou encore de céder à des annonces douteuses commercialisant des solutions clés en main à moindres frais. Mais la méfiance est de mise ! Car ce marché de niche mais à fort potentiel n'échappe pas aux arnaques et tromperies. Or, en cas de malfaçon, le risque est bel et bien l'effondrement du bunker ou l'asphyxie ! Mieux vaut donc se tourner vers des entreprises spécialisées aguerries et reconnues pour leur expertise.
Le saviez-vous ?
Il existe peu de chiffres sur les bunkers français. En 2017, un sénateur évoquait à peine un millier d'abris, dont 600 militaires et environ 400 civils privés. De son côté, l'Allemagne a lancé un « plan bunker » en 2024 pour répertorier tous ses abris, tandis que la Suède distribue déjà un fascicule pour indiquer où aller en cas de bombardement. Mais c'est la Suisse qui est la mieux préparée puisque la loi helvétique impose depuis 1963 d'équiper toute construction d'habitation d'un abri antiatomique ! Le pays en compte 370 000, avec une capacité d'accueil de 9 millions de personnes, soit une couverture de plus de 100 % selon l'Office fédéral de la protection de la population.