Un drôle de nom pour une drôle de plante. La cardère sauvage, ou cabaret des oiseaux, est une étonnante fleur qui, sous ses airs de chardon, cache bien des intérêts. Et si, au cours d'une promenade estivale, vous alliez en récolter quelques graines qui serviront de première pierre à la construction d'un cabaret dans votre jardin ?
Un cabaret est une salle de spectacle où l'on peut boire et manger. La cardère sauvage est donc bien, un cabaret pour les oiseaux, nous allons le démontrer sans plus attendre. Aux volatiles, la nourriture et la boisson, et à vous, le spectacle.
Ne pas confondre
Au premier coup d'œil, la cardère sauvage (Dipsacus fullonum) passe pour un vulgaire chardon. Certes, comme lui, des épines bien acérées dissuadent les herbivores de la brouter. Certes, ils ont en commun une floraison volumineuse, dont la forme et la couleur mauve pâle pourraient sembler similaires. Certes, ce sont des fleurs sauvages frugales qui poussent sans peine dans les friches et les talus. Mais la comparaison s'arrête là, car les deux plantes n'appartiennent pas à la même famille. Et puis enfin, voyons, la cardère est beaucoup plus racée !
Une bien jolie fleur
La floraison de la cardère, très élégante, est assez courte. Mais heureusement, plusieurs inflorescences se succèdent de juillet à septembre. Après la fanaison, la chute des pétales révèle la structure desséchée du capitule bombé sur lequel s'inséraient les minuscules fleurs. Ce squelette floral apparaît hérissé de milliers d'épines, entre lesquelles se logent désormais les graines. Il porte à sa base, comme la garde d'une épée, un involucre formé par quatre majestueuses bractées épineuses qui se relèvent à mesure qu'elles sèchent. Décidément, dans le jardin, ou en bouquet, frais ou sec, cette fleur a de l'allure !
À boire et à manger
Les graines de la cardère sont riches en lipides : de quoi attirer à la ronde tous les oiseaux granivores du quartier, dont le chardonneret qui en raffole. Les allées et venues et les acrobaties de tous ces passereaux qui s'y perchent pour y trouver leur pitance sont en soi un spectacle saisissant. Mais dans un cabaret, on peut aussi y boire. Alors où les oiseaux trouvent-ils leur eau ? La réponse se trouve à l'aisselle des feuilles qui s'insèrent de biais, deux par deux, face à face autour de la tige. On dit qu'elles sont opposées. Étant soudées à leur base, elles forment une cavité étanche où l'eau de pluie s'accumule. Les oiseaux viennent y boire durant les jours qui suivent une intempérie.
Deux années d'existence
La cardère est une plante bisannuelle dont les graines germent dans le courant du printemps. Durant les mois qui suivent, la plantule forme une rosette de feuilles au ras du sol, mais déploie surtout une racine pivot solide et profonde. Elle passe l'hiver sous cette forme discrète et aplatie, mais très résistante. Puis, au printemps suivant, elle s'élève sur sa tige, jusqu'à atteindre un mètre et plus, avant de fleurir au cours de l'été et de monter en graines. Dépourvues d'ailettes, à l'inverse de celles du chardon, elles ne s'envolent pas avec le vent ce qui fait que la cardère n'est pas une plante envahissante.
Prenez-en de la graine
La récolte des graines se fait durant l'été… avec une paire de gants. En secouant la fleur fanée au-dessus d'un tissu, on peut récupérer des graines à foison qu'il suffira de ressemer au printemps suivant pour l'introduire dans son jardin. Adaptée à son environnement, la cardère ne réclame aucun soin particulier, sauf un peu d'eau durant le premier été. Fine, graphique et verticale, elle structure avec bonheur les massifs à tous les plans.
Il y en a pour tout le monde !
Avant d'attirer les oiseaux avec ses graines, la fleur de la cardère s'avère d'abord très attractive auprès des insectes pollinisateurs qui se délectent de son nectar.