L'art du bonsaï consiste à donner la forme d'un vénérable centenaire à un jeune arbrisseau. Habituellement, dans la nature, c'est le poids des ans et la furie des intempéries qui sculptent lentement les troncs et les branches. Dans le cas du bonsaï, c'est par la ligature qu'on y parvient plus rapidement. Une opération à mener de préférence durant le repos végétatif.
L'art du bonsaï, c'est faire du vieux avec du jeune. Tout un programme…
Dans la nature, ce qui fait la spécificité d'un vieil arbre et toute la singularité de sa silhouette est façonné par le temps et les intempéries. Les coups de vent, la pluie, les chutes de neige ou les maladies n'ont de cesse de provoquer des modifications, profondes ou insensibles, de son architecture. Les branches en particulier s'étalent et s'entortillent, se mettent à ployer sous les effets de porte-à-faux, donnant à la ramure des formes spécifiques. Le long du tronc qui se dégarnit par le bas, de-ci, de-là, quelques branches cassées manquent à l'appel, provoquant des ruptures de symétrie. La forme générale de l'arbre prend ainsi un caractère unique qui fait sa beauté et son identité propre.
L'art de la ligature
Dans le cas du bonsaï, il revient au cultivateur de donner l'illusion d'un port lentement façonné par la nature, et c'est la ligature qui rend possible cet artifice. Elle consiste à entortiller autour des branches encore souples, dont on veut changer l'orientation, des fils d'aluminium ou de cuivre qui vont les contraindre, par leur rigidité, à adopter des nouvelles formes. Le processus de lignification, c'est-à-dire de durcissement du bois, va permettre de figer ensuite durablement la nouvelle posture et de retirer les fils.
Le moment propice
Afin de ne pas provoquer des cicatrices qui auraient bien du mal à disparaître, il est important de ne pas laisser les fils en place plus de quelques mois, en particulier sur les feuillus dont l'écorce lisse est relativement fragile. En ligaturant les branches durant la période du repos végétatif, de novembre à février, on limite ce risque car l'intervention a lieu en dehors de la période de croissance. Du printemps à l'été, durant la période végétative, au contraire, les fils ont tendance à s'incruster très vite dans le bois quand celui-ci s'expanse au cours de la croissance.
La ligature, mode d'emploi
Tout en maintenant la branche dans sa position définitive et après avoir fixé sur elle un point d'ancrage avec l'extrémité du fil, on enroule celui-ci sur l'écorce, de l'intérieur vers l'extérieur de l'arbre, en spirales régulières d'environ 45°. Le diamètre du fil doit être adapté à celui de la branche. Un petit test préalable permet de s'en assurer : en appuyant fortement le bout du fil sur la branche, c'est la branche qui doit ployer et non le fil qui doit se tordre.
Des noms et des bonsaïs
C'est la ligature qui permet de façonner les nombreux bonsaïs dont les appellations japonaises, strictes, illustrent la complexité des codes qui régissent cet art : le « Kengaï » dont le tronc retombe majestueusement en cascade hors du pot, le « Bankan » au tronc tortueux qui s'enroule sur lui-même, le « Fukigashi » qui semble sculpté à l'horizontale par un vent tempétueux ou le « Chakan », au tronc en oblique et aux branches horizontales taillées en nuages.
