Saviez-vous que vos périodes d'arrêt maladie ou d'accident non professionnel n'étaient pas comptabilisés dans le calcul de vos congés payés ? Une récente jurisprudence de la Cour de cassation est venue y remédier. Décryptage.
Parce que tout labeur mérite repos, les congés payés comptent parmi les piliers fondamentaux du droit du travail. Ainsi, tout employé, qu'il soit à temps plein ou partiel, acquiert en jours de repos l'équivalent de 2,5 jours ouvrables de travail effectif par mois, soit 30 jours ouvrables ou 5 semaines de congé pour une année complète. Mais qu'en est-il en cas d'absence ? On fait le point.
Des périodes assimilées ou non
C'est l'article L3141-5 du Code du travail qui détermine quelles sont les absences considérées comme du travail effectif et de ce fait prises en compte pour l'acquisition des congés payés.
Ainsi, il va sans dire que les périodes correspondant à l'utilisation de ces fameux jours de repos sont évidemment incluses, tout comme les repos compensant des heures supplémentaires ou encore les jours de RTT (réduction du temps de travail). De même, congés paternité, maternité, adoption mais aussi pour événements familiaux, tels que mariage, Pacs, naissance ou décès, et autre congé de formation rentrent eux aussi dans l'équation.
À l'inverse, une mise à pied, une grève et un congé parental à temps plein ou de présence parentale ne sont pas assimilés à des périodes de travail effectif et ne participent donc pas à l'acquisition de congés payés.
L'état de santé en jeu
La donne se complique en revanche pour l'état de santé du salarié. En effet, le Code du travail prend uniquement en considération les arrêts pour maladie professionnelle et accident du travail, et ce, sous réserve que l'absence ne dure pas plus d'un an ininterrompu.
Dès lors que vous posez un arrêt pour une maladie non professionnelle ou en raison d'un accident survenu en dehors de votre poste, cette absence n'est donc pas assimilée à du travail effectif et peut avoir un impact négatif sur le calcul de vos congés payés si elle vient à se prolonger.
Bien qu'il ne faille pas justifier d'une année complète de travail pour prétendre à l'ensemble de ses jours de repos, il faut en effet cumuler 48 semaines de travail effectif (absences assimilées incluses) pour bénéficier des 30 jours ouvrables de congé prévus par la loi.
Revirement de jurisprudence
Mais d'après la Cour de cassation, cette législation est contraire à l'article 7 de la Directive européenne 2003/88 selon laquelle : « Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines. » Les juges ont donc pris les choses en main à travers trois arrêts de jurisprudence rendus le 13 septembre 2023.
Ainsi, la Cour considère que les arrêts de travail pour maladie ou accident non professionnel doivent être assimilés à des périodes de travail effectif et donner droit à l'acquisition de congés payés. Quant aux arrêts pour maladie et accident professionnels, ils doivent être pris en compte peu importe leur durée, au lieu de la limite d'un an imposée.
Enfin, le droit national prévoit que si un salarié n'a pas pu bénéficier de ses congés payés, il a 3 ans pour les réclamer à partir de la fin de l'année au cours de laquelle il les a acquis. Là encore, la Cour de cassation balaie la disposition et considère que le délai de prescription ne débute que si l'employeur a effectivement permis à son employé d'exercer ce droit.
Quelles conséquences ?
Attention : la Cour de cassation n'a pas le pouvoir de modifier directement la législation ! En revanche, à travers ces arrêts, elle indique clairement la nouvelle marche à suivre aux conseils prud'homaux, en charge de tous les litiges du Code du travail, et donne aux salariés de nouveaux moyens de défendre leurs droits. C'est en outre un appel du pied à l'État pour qu'il modifie la loi. D'ici là, les employeurs peuvent donc choisir de se conformer à ces décisions afin de régulariser d'éventuelles situations similaires en interne ou de les ignorer et d'attendre l'issue d'un éventuel contentieux.