Déjà pointés du doigt pour divers problèmes sanitaires, les produits de défrisage capillaire sont aujourd'hui suspectés d'accroître le risque de cancer de l'utérus. Leurs utilisatrices sont en effet deux fois plus touchées par cette pathologie que la moyenne des femmes d'après une récente étude américaine. Décryptage.
Une étude menée aux États-Unis par des chercheurs des National Institutes of Health (NIH), des institutions gouvernementales, et publiée le 17 octobre dans le Journal of the National Cancer Institute, met en lumière le lien entre l'utilisation régulière de produits chimiques pour lisser les cheveux frisés et un risque accru de cancer de l'utérus. En effet, sur les 33 500 femmes suivies durant 11 ans, celles qui appliquaient 4 fois par an ou plus des défrisants étaient 2,5 fois plus susceptibles que les autres d'être affectées par cette maladie. « Nous estimons que 1,64 % des femmes n'ayant jamais utilisé ce type de produits auront développé un cancer de l'utérus d'ici leurs 70 ans, mais pour des utilisatrices régulières, ce risque passe à 4,05 % », explique ainsi dans un communiqué le Dr Alexandra White, principale auteure de l'étude. Si aucune cause n'a encore été clairement établie par les experts, plusieurs pistes sont envisagées.
Des composants nocifs
Les ingrédients chimiques contenus dans les défrisants et destinés à modifier durablement la structure du cheveu, tels que bisphénol A, parabènes, métaux et autre formaldéhyde ou formol (dont la France a limité le taux maximal autorisé dans des produits du type lissages brésiliens car cette substance est classée comme cancérogène) sont fréquemment dénoncés par les autorités sanitaires. En effet, ils sont aussi responsables de brûlures, réactions allergiques et perte de cheveux, pouvant aller jusqu'à l'alopécie.
Les chercheurs pensent notamment que les lésions provoquées au niveau du cuir chevelu pourraient permettre le passage des produits dans le corps, qui agiraient alors comme des perturbateurs endocriniens. « On peut s'attendre à ce qu'ils aient un impact sur les cancers hormonodépendants », explique le Dr Alexandra White. Et de poursuivre : « L'inquiétude est que ces articles contiennent des produits chimiques qui pourraient agir comme l'œstrogène dans le corps. » De précédents travaux menés par la chercheuse avaient ainsi établi un lien entre les produits de défrisage capillaire et un risque augmenté de cancer du sein et des ovaires. « Plus de recherches sont nécessaires pour identifier les molécules spécifiques qui pourraient augmenter ce risque de cancer chez les femmes », conclut-elle.
Les femmes noires particulièrement touchées
Les produits de défrisage ayant pour but de lisser la fibre capillaire, les femmes noires et métisses, à la chevelure naturellement frisée ou crépue, sont les premières concernées par ces données inquiétantes. Ainsi, les National Institutes of Health révèlent que 60 % des femmes de l'étude américaine ayant déclaré avoir utilisé des produits de défrisage dans l'année s'identifiaient comme noires. De précédents travaux avaient également fait le lien entre les crèmes cosmétiques de blanchissement de l'épiderme et des problèmes cutanés, tels que des troubles de la pigmentation, infections, brûlures, mauvaise cicatrisation et cancers de la peau, touchant là aussi principalement les femmes noires et sud-asiatiques.
Face à ces résultats, des experts indépendants ont invoqué un principe de précaution et réclament une réglementation plus stricte autour de ces produits. Ils appellent ainsi dans un communiqué à lutter contre « le manque de transparence sur les produits chimiques » et à « s'attaquer aux standards de beauté racialisés ».
